Dans la majestueuse halle du Carreau du Temple, Moovance a capturé un moment d’exception avec Soria Rem et Mehdi Ouachek d’Art Move Concept. Un plan séquence qui révèle leur complicité unique, fruit de vingt ans de danse et de vie commune.
Une fusion artistique unique
Plus qu’un simple duo de danse, Soria et Mehdi incarnent une fusion totale entre vie personnelle et artistique. Venus respectivement du battle et du théâtre, ils ont développé leur propre langage chorégraphique, mêlant hip-hop, mime, clown et danse contemporaine dans une approche qu’ils qualifient d' »abstract hip-hop ».
Une évolution constante
De leur rencontre dans la danse à leur consécration au Festival Jacob’s Pillow aux États-Unis, leur parcours illustre une quête perpétuelle d’innovation. Leur travail ne se limite pas à superposer les styles mais cherche à créer une véritable mixité des arts, une nouvelle forme d’expression.
Un engagement partagé
Pour le Festival Kalypso, ils ont créé spécialement « Anopas », un spectacle qui, malgré les contraintes du Covid, a confirmé leur capacité à se réinventer et à toucher leur public. Une nouvelle étape dans leur parcours d’artistes engagés dans la transmission et le partage.
Rencontre avec Soria Rem & Mehdi Ouachek
À travers cet entretien, Soria Rem et Mehdi Ouachek nous dévoilent les coulisses de leur collaboration unique au sein de leur compagnie Art Move Concept. De leur rencontre dans le monde de la danse à leur vision du mouvement comme ultime liberté, en passant par les défis de la création en couple, ils partagent avec générosité leur expérience et leur philosophie.
« Je pense sincèrement que le mouvement, la danse, c’est la rare liberté qui nous reste, même peut-être l’unique liberté qui nous reste. Tu peux danser dans tous les pays, on peut pas t’interdire. »
Découvrez l’interview de Soria Rem & Mehdi Ouachek
On est un couple de danseurs, un duo, mais un couple aussi dans la vie. Donc voilà, on travaille ensemble, on mange ensemble, on dort ensemble, on vit ensemble, les enfants ensemble, les chiens, les maisons, tout tout tout !
Comment définissez-vous votre style de danse ?
Du coup, moi, j’ai commencé vraiment par le break dance. Et puis j’ai viré un peu en travaillant avec des chorégraphes différents vers du contemporain et du coup, maintenant, je mélange les genres. Je suis plutôt hip hop abstract.
On a essayé de faire évoluer notre danse qui est basiquement du hip hop. Non pas en superposant les arts, mais nous, on a vraiment travaillé sur la mixité, c’est-à-dire comment on prenait le contemporain, le mime, le clown et les acrobaties et comment on créait une nouvelle gestuelle.
Quelles sont vos inspirations ?
On a toujours été un petit peu clown dans la vie, surtout lui. J’ai toujours été attiré par l’univers clownesque. Comment on amenait la danse dans le clown, c’était une suite logique. La danse évoluait, le clown était notre univers, on a vraiment embrassé les deux.
Que représente la danse pour vous ?
Pour nous, c’est tout. On se lève, on a envie de danser. Ça fait partie intégrante de notre vie. C’est un langage corporel, c’est-à-dire que même sans parler avec la parole, on peut s’exprimer, on peut discuter. C’est un brassage, un mélange, vraiment un langage universel pour nous.
C’est surtout que ça nous a tout donné. On s’est rencontrés dans la danse. On a grandi dans la danse. On s’est épanoui dans la danse. On s’est établi en tant que mari et femme dans la danse.
Ça change quoi de danser en duo ?
Sur les débuts, travailler avec quelqu’un avec qui on est en couple dans la vie, c’est très difficile. Il faut faire la part des choses entre la vie de couple et le travail. Une fois qu’on a réussi à passer tous ces caps là, après, ça va vraiment beaucoup plus vite.
À quoi ressemblent vos parcours ?
Mehdi : Pour moi, la danse, ça a été vraiment une rencontre hasardeuse. J’étais dans l’univers plutôt football et j’ai eu une maladie de croissance, Osgood-Schlatter. Vu que j’étais en centre de formation, j’ai très mal vécu la chose et par hasard, je suis tombé sur un film où il y avait des scènes de danse et je suis vraiment resté ébahi. C’était la première fois dans ma vie où je pouvais faire quelque chose sur laquelle personne n’avait de contrôle.
Soria : Pour ma part, j’ai une formation de gymnaste. J’ai rencontré la danse hip hop en 1998. On était baigné dans la musique hip hop. J’ai rencontré des danseurs du groupe Wanted Posse qui m’ont formée. Je suis vraiment tombée amoureuse de cette danse parce que ça m’a permis de vraiment m’épanouir.
Quelle est la qualité de l’autre ?
Mehdi : Elle est forte dans tous les domaines. En tant que mère, en tant que femme, en tant que danseuse. Elle gère la compagnie, les comptes, la famille, les amis, tous ceux qu’on emploie. Et en plus, elle est designeuse maintenant.
Soria : Il est PRESQUE parfait. Non, je rigole, il est parfait ! Sa qualité, c’est qu’il est un moteur dans ma vie et pour plein d’autres mondes aussi, un moteur dans la vie en général. Il est aussi exigeant avec lui qu’avec tout le monde.
Et les défauts ?
Soria : Je dirais que faut le suivre. Il est fou du matin jusqu’au soir et des fois j’en peux plus.
Mehdi : Le défaut à Soria, c’est qu’elle a trop peu confiance en elle, alors qu’elle ne devrait pas !
Quel est votre plus beau souvenir lié à la danse ?
Ça a été le fait que notre compagnie soit invitée au Festival Jacob’s Pillow aux États-Unis. On a été la première compagnie française à être le temps fort là-bas, avec deux spectacles qui jouent pendant une semaine. C’était une expérience de folie.
Quel est votre lien avec le Festival Kalypso ?
Mourad nous a proposé d’être égérie des deux festivals, sur toutes les thématiques à travers Karavel et Kalypso, c’était la première fois qu’il faisait ça. On a créé le spectacle « Anopas » spécialement pour l’occasion, qui est tombé pile poil au pire moment du Covid. Mais Mourad a quand même voulu le produire en live.
Quelle est votre approche de la transmission ?
Dans notre travail de compagnie, que ce soit Soria ou moi, on essaie d’être moteur. Je me sens pas vraiment chorégraphe. La matière et la danse sont apportées par nos danseurs. Notre rôle, c’est plus d’être metteur en scène et surtout d’être moteur.
Comment la danse change-t-elle le monde ?
Je pense sincèrement que le mouvement, la danse, c’est la rare liberté qui nous reste, même peut-être l’unique liberté qui nous reste. Tu peux danser dans tous les pays, on peut pas t’interdire. On peut interdire de parler, on peut même interdire de penser comme tu veux, mais on peut pas t’interdire de danser.
Un petit mot pour la fin ?
On ne va pas lâcher. Nous, on va continuer à travailler dur. On va continuer à donner du rêve juste en dansant.